L'hémicycle du Sénat français en septembre 2009

Il est extraordinaire qu'en 2021 des sénateurs et des députés complètement égocentrés ou inconscients du danger climatique n'arrivent pas à s'entendre sur la nécessité de préserver l'avenir des générations futures plutôt que leur intérêt personnel immédiat.

Alors que les députés avaient accepté à l'Assemblée nationale la proposition de la Commission citoyenne pour le climat d'inscrire dans la constitution française que la République « garantit » la préservation de l'environnement, les sénateurs, majoritairement de droite, ont refusé dans la nuit du lundi 10 mai 2021 ce texte jugé trop contraignant. En d'autres termes, ils souhaitent faire passer le développement et la croissance à court terme avant la préservation d'un environnement qui est pourtant le nôtre, et dont notre survie en tant qu'espèce dépend.

 Il semble que les sénateurs aient réécrit ensuite la formule, mais en l'absence de texte identique entre l'Assemblée et le Sénat, point de référendum ni de révision de la constitution possible. Il ne reste plus qu'à espérer un accord sur un nouveau texte. Mais il y a gros à parier que, vidé de son sens, le texte remanié fera hurler les membres de la Commission citoyenne dont le travail a déjà été copieusement détricoté (« seules treize des 149 propositions de la convention citoyenne sont reprises à l’identique » dans la loi Climat et résilience adoptée mardi à l'Assemblée, se plaignent des responsables de l'opposition, cf. Le Monde, 9 mai 2021).

Un conseiller de l'exécutif signalait cependant à un journaliste de France-info : « A un an de la présidentielle, la droite ne peut pas montrer qu’elle se fout de l’environnement » (France info, 11 mai 2021). Une phrase extraordinaire, qui montre bien les limites d'une démocratie dans laquelle l'intérêt du peuple et du pays tout entier, voire de l'humanité, passe bien après la volonté d'être réélu. Tout en ce moment est soumis à la chasse aux électeurs, une chasse pour laquelle toutes les bassesses sont possibles (y compris des lois « ad hoc », liberticides et sans intérêt, destinées uniquement à récupérer l'électorat des policiers et du Front national (RN depuis 2018) – tous les criminologues savant que la suppression de la peine de mort n'a pas fait exploser la criminalité, mais qu'au-delà de dix ans de prison un individu est quasiment irrécupérable pour la société. Les nouvelles lois proposées aujourd'hui par le gouvernement en alourdissant les peines ne vont que faire augmenter les taux de récidive, et vouloir doubler la capacité des prisons pour les mineurs est une stupidité : la prison, c'est l'école du crime). 

 Revenons à ce qui nous intéresse, c'est à dire le climat. Le seul espoir que nous ayons aujourd'hui réside dans l'information des citoyens (c'est le but de notre ONG), et leur capacité à faire savoir leur mécontentement devant un gouvernement et des assemblées qui sacrifient ouvertement leur avenir et celui de la planète à leur intérêt personnel. 

Dimanche dernier, des marches pour le climat ont été organisées dans l'espoir de décider les sénateurs à faire leur devoir et pour protester contre le manque d'ambition de la loi Climat et un gouvernement qui visiblement traîne des pieds : « le gouvernement manœuvrait pour que le processus n’aille pas au bout, refusant toutes concertations avec le Sénat », a dénoncé le député écologiste Matthieu Orphelin.

On a compté ce 9 mai 163 défilés et 115.000 marcheurs dont 56.000 à Paris (chiffres des organisateurs cités par le journal Le Monde, pour la police il s'agirait de 46.918 personnes, dont 8.500 à Paris). Quelque soit la réalité des chiffres, ils n'ont pas réussi à faire plier les sénateurs, dont l'élection il est vrai ne dépend pas du grand public. L’annulation éventuelle du référendum « envoie un signal inquiétant sur la prise de conscience sur ces sujets chez les parlementaires », a noté Greenpeace. A Paris, on pouvait lire sur une banderole : « Loi climat = échec du quinquennat ». 

Que reste-t-il aujourd'hui de la volonté affichée par Emmanuel Macron au début de son quinquennat de faire de la France le leader mondial de la lutte pour le climat (Accords de Paris, Plan climat de Nicolas Hulot, etc.) ? En quatre ans les masques sont tombés, les promesses se sont révélées être des mensonges, et l'exécutif a perdu toute crédibilité sur le sujet. 

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It is extraordinary that in 2021 senators and deputies completely egocentric or oblivious to the climate danger cannot agree on the need to preserve the future of future generations rather than their immediate personal interest.

While the deputies had accepted in the National Assembly the proposal of the Citizen's Commission for the Climate to include in the French constitution that the Republic "guarantees" the preservation of the environment, the senators, mostly on the right, refused in the night of Monday, May 10, 2021, this text deemed too restrictive. In other words, they want to put short-term development and growth ahead of the preservation of an environment that is ours, and on which our survival as a species depends.
It seems that the senators then rewrote the formula, but in the absence of an identical text between the Assembly and the Senate, no referendum or revision of the constitution possible. All that remains is to hope for an agreement on a new text. But it's a good bet that, emptied of its meaning, the revised text will make the members of the Citizens 'Commission scream, whose work has already been copiously unraveled ("only thirteen of the 149 proposals of the citizens' convention are repeated identically »In the Climate and Resilience law adopted Tuesday in the Assembly, complain of opposition leaders, see Le Monde, May 9, 2021).

An adviser to the executive, however, told a journalist from France-info: "One year before the presidential election, the right cannot show that it does not care about the environment" (France Info, May 11, 2021). An extraordinary sentence, which clearly shows the limits of a democracy in which the interest of the people and the whole country, even of humanity, comes well after the desire to be reelected. Everything is currently subject to the hunt for voters, a hunt for which all baseness is possible (including "ad hoc" laws, liberticidal and without interest, intended only to recover the electorate of the police and the Front national (RN since 2018) - all criminologists knowing that the abolition of the death penalty did not explode crime, but that beyond ten years in prison an individual is almost irrecoverable for society. The new laws proposed today by the government by increasing the sentences will only increase the rates of recidivism, and wanting to double the capacity of prisons for minors is stupid: prison is the school of crime).

Let's come back to what interests us, ie the climate. The only hope we have today lies in informing citizens (it's the goal of our NGO), and their ability to express their discontent before a government and assemblies which openly sacrifice their future for their personal interest. Last Sunday, climate marches were organized in the hope of persuading senators to do their duty and to protest against the lack of ambition of the Climate law and a government which is visibly dragging its feet: "the government was maneuvering for that the process does not go to the end, refusing all consultations with the Senate ”, denounced the environmentalist deputy Matthieu Orphelin. On May 9, there were 163 parades and 115,000 marchers, including 56,000 in Paris (figures from the organizers cited by the newspaper Le Monde, for the police it would be 46,918 people, including 8,500 in Paris). Whatever the reality of the figures, they have failed to bend the senators, whose election it is true does not depend on the general public. The possible cancellation of the referendum "sends a worrying signal about the awareness of these issues among parliamentarians," Greenpeace noted. In Paris, one could read on a banner: “Climate law = failure of the five-year term”.

What remains today of the will displayed by Emmanuel Macron at the start of his five-year term to make France the world leader in the fight for the climate (Paris Agreements, Nicolas Hulot's Climate Plan, etc.)? In four years the masks have fallen, the promises have turned out to be lies, and the executive has lost all credibility on the subject.

Photo : L'hémicycle du Sénat français en septembre 2009. Statues de Turgot, Daguesseau, Lhopital, Colbert, Molé (auteur/author :  Romain Vincens, 19 septembre 2009).

Lire/to read : 

Des milliers de personnes marchent pour le climat dans toute la France avant l'examen de la loi au Sénat

Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté, dimanche 9 mai, pour réclamer au pouvoir plus d'ambition écologique, au moment même où la promesse présidentielle d'un référendum pour inscrire la protection du climat dans la Constitution semble avoir du plomb dans l'aile.

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