Les femmes savanttes de Molière sur Amazon Capture d’écran 2023-04-12 à 15

Il reste aujourd'hui 3.500 librairies selon le site du ministère de la Culture (chiffre confirmé par le site du Syndicat de la librairie française, études non datées), dont aucun en capacité de faire un réel conseil de lecture - le nombre des nouvelle sorties étant tel qu'aucun libraire n'a le temps de lire tous les ouvrages sortant chaque mois. Pour faire plaisir à ces 3.500 personnes qui s'accrochent à un métier en voie de disparition, le gouvernement français vient d'interdire aux vendeurs de livres en ligne la gratuité des prix de livraison, en imposant un prix minimum de 3 euros pour celle-ci. Ce vendredi 7 avril, les ministres de la culture et de l’économie Rima Abdul Malak et Bruno Le Maire ont signé l’arrêté fixant ce nouveau tarif minimum

Personnellement, j'habite dans un village de 1.200 habitants, et la librairie la plus proche (très petite, avec un choix de livres très limité) se trouve à 25 km de chez moi. Aller tenter d'acheter un livre à l'unique librairie de la préfecture du département (je dis bien tenter, car rien ne dit que j'y trouverai un livre m'intéressant) me demande donc de faire 50 km (coût rien qu'en carburant : environ 6 euros), passer une heure sur les routes - toute une demi-journée et 3 euros si je choisis un des rares bus desservant mon village). D'une manière comme d'une autre, cela veut dire brûler beaucoup de carburant et émettre beaucoup de CO2 dans l'atmosphère, beaucoup plus qu'en me faisant livrer directement par Amazon, le numéro un de la vente de livres en France.

Je ne suis pas le seul de ce cas. Environ 19 % de la population française vit dans des bourgs et des villages, soit plus de 12 millions de personnes que le gouvernement français compte bien inciter ainsi à consommer davantage de carburants et polluer un peu plus la planète. Ou décourager encore un peu plus les gens de lire.

En effet, l'augmentation du prix de vente de trois euros par livre n'est pas neutre : un best-seller comme "Les piliers de la terre" de Ken Follet passe de 11,90 euros à 14,90 euros (+25,21 % d'augmentation, ce qui est déjà énorme) ; mais dans le même temps, un classique comme "Les femmes savantes" de Molière passe de 2,00 € à 5,00 € (250 % d'augmentation). Tous les livres vont être très lourdement pénalisés, et en particulier ceux dits classiques, dont les prix de vente sont faibles. Découvrir Molière ou Racine pour deux euros, cela peut donner envie. A cinq euros, c'est carrément dissuasif.

Le gouvernement français, après avoir trahi la semaine dernière ses engagements environnementaux sous la pression des lobbies de la pêche, trahit une nouvelle fois ses engagements, cette fois-ci sous la pression des libraires. 

Victime collatérale - mais dont tous les gouvernements se moquent bien : la culture. En France on trouvait en moyenne deux livres dans chaque foyer il y a vingt ans. Ce chiffre est sans doute en baisse aujourd'hui. En 2022, "Le nombre moyen de livres lus en entier par an est assez faible : 3,5. Ce sont les romans policiers qui sont les plus lus intégralement….On veut connaitre la fin ! En revanche, les livres les moins consultés sont les livres de poésie et les livres scientifiques." (site "La finance pour tous", 22 juillet 2022).

Le comble est que les libraires eux-mêmes ne sont pas contents ! Ils souhaitaient en effet un coût minimum de livraison de 4,5 euros, arguant que leurs propres coûts d'envoi des livres au domicile de leurs clients est de l'ordre de 7 €. Il serait temps que les professions obsolètes acceptent l'évolution. Les cireurs de chaussures, les rémouleurs, les allumeurs de réverbères, les crieurs de journaux, les vendeurs de petits formats (qui sait encore ce qu'est un "petit format" ?) ont tous disparu,et le monde ne s'en porte pas plus mal. En France, le monde du livre se porterait beaucoup mieux avec la disparition des libraires (petits commerces obsolètes proposant très peu de références par rapport à un site comme Amazon, très peu de services - moins que sur Amazon - et des prix jamais inférieurs) et l'abrogation de l'arrêté Malak/Le Maire du 7 avril. 

Cette augmentation des coûts invraisemblable prendra effet le 7 octobre 2023. D'ici là, je vous souhaite d'excellentes lectures. Profitez-en tant que vous le pouvez encore ! Le livre, c'est la vie !

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Today there are 3,500 bookstores left according to the website of the Ministry of Culture (figure confirmed by the website of the Syndicate of the French bookstore, undated studies), none of which is able to give real reading advice - the number of new releases being such that no bookseller has time to read all the books coming out each month. To please these 3,500 people who cling to an endangered profession, the French government has just banned online book sellers from free delivery, by imposing a minimum price of 3 euros for this one. this. This Friday, April 7, the Ministers of Culture and Economy Rima Abdul Malak and Bruno Le Maire signed the decree setting this new minimum rate.

Personally, I live in a village of 1,200 inhabitants, and the nearest bookstore (very small, with a very limited choice of books) is 25 km from my home. Going to try to buy a book at the only bookstore in the prefecture of the department (I say try, because nothing says that I will find a book that interests me there) therefore asks me to travel 50 km (cost only in fuel: about 6 euros), spend an hour on the roads - a whole half-day and 3 euros if I choose one of the few buses serving my village). Either way, that means burning a lot of fuel and emitting a lot of CO2 into the atmosphere, much more than having me deliver directly from Amazon, the number one seller of books in France.

I am not the only one in this case. About 19% of the French population lives in towns and villages, i.e. more than 12 million people whom the French government intends to encourage in this way to consume more fuel and pollute the planet a little more. Or discourage people from reading even more.

Indeed, the increase in the selling price of three euros per book is not neutral: a bestseller like "The Pillars of the Earth" by Ken Follet goes from 11.90 euros to 14.90 euros (+25 .21% increase, which is already huge); but at the same time, a classic like "Les femmes savantes" by Molière goes from €2.00 to €5.00 (250% increase). All books will be very heavily penalized, and in particular those called classics, whose selling prices are low. Discover Molière or Racine for two euros, it can make you want. At five euros, it's downright dissuasive.

The French government, after betraying its environmental commitments last week under pressure from fishing lobbies, is once again betraying its commitments, this time under pressure from booksellers.

Collateral victim - but of which all governments don't care: culture. In France there were on average two books in each home twenty years ago. This figure is probably down today. In 2022, "The average number of books read in full per year is quite low: 3.5. Crime novels are the most read in full... We want to know the end! On the other hand, the least consulted books are books of poetry and books of science." (website "Finance for all", July 22, 2022).

The height is that the booksellers themselves are not happy! They wanted a minimum delivery cost of 4.5 euros, arguing that their own costs of sending the books to their customers' homes is around 7 €. It is time for obsolete professions to accept evolution. The shoe polishers, the grinders, the lamplighters, the newspaper vendors, the sellers of small formats (who still knows what a "small format" is?) have all disappeared, and the world is not far from it no worse. In France, the world of books would be much better off with the disappearance of booksellers (small obsolete businesses offering very few references compared to a site like Amazon) and the repeal of the Malak/Le Maire decree of April 7.

This incredible cost increase will take effect on October 7, 2023. Until then, I wish you great reading. Enjoy it while you still can! The book is life!